Hourrah pour la France : le « Grand Emprunt » est enfin là !
Cette
annonce rappelle à s´y méprendre l´arrivée du beaujolais nouveau ou
comme dans les année ´20 et ´30 l´arrivée du bon chocolat suisse. Ou
plus
sarcastique et méchant : un jour prochain, des parents grecs étireraient
leurs rejetons par les oreilles pour les hisser au dessus de la
palissade que
la crise et son désagréable endettement avait érigé entre ce pays et les
autres
pays du continent européen : « Là, là, loin à l´horizon…de pourpre, de
fierté et de défi : l´incomparable pays du Grand Emprunt ». Et avec
regret les pères avoueraient à leurs enfants : si au moins nous avions
eu
le même courage, au lieu de trafiquer nos chiffres et nous enfoncer dans
la mélasse
de la stagnation économique en nous cachant de nos erreurs au lieu de
les
réparer avec franchise, diligence et honnêteté économique !
Le Grand
emprunt, nécessité, illusion ou fuite indécise en
avant ?
De la revue
de presse du Nouvel observateur on peut lire ceci :
LA MONTAGNE
Xavier Panon
"(...) L'année 2010 s'annonce plus chaude que la précédente. Une sorte
d'effet de serre social, activé par la perspective d'une sortie de crise
qui
peut libérer le refoulé. (...) Difficile de prédire que tout ceci peut
faire
une mayonnaise, mais les ingrédients sont sur la table. De quoi mettre
tout le
monde sous pression. Ceux qui vont continuer de subir les effets de la
crise,
accentués par une perte plus réelle encore du pouvoir d'achat en raison
de la
fin des plans de relance, des hausses de prix et des prélèvements
divers, comme
sur la santé. Sous pression aussi, à mi-quinquennat, le président
confronté à
un nouveau défi. Ses moulinets sur l'identité et la sécurité
apparaissent déjà
décalés, aux yeux même de sa majorité pour le moins perplexe. L'homme du
Grand
emprunt, au nom de l'avenir, est menacé du Grand écart avec la réalité
immédiate. Entre ceux qui payent déjà plein pot et ceux qui peuvent
s'attendre
à payer la facture de la dette et des déficits, cela risque de faire pas
mal de
monde au rendez-vous de la rupture. Les socialistes misent là-dessus
pour
engranger dès les régionales. Nicolas Sarkozy, leur 'désopilant' DRH,
fera tout
pour éviter la faute professionnelle."
PROGRES
DE LYON
Francis Brochet
"Mon budget est enfoncé, ma dette explose. Excellent : j'emprunte !
Notre
Président est le Foch de l'économie. Les comptes de la France sont au
plus mal,
la situation paraît désespérée, que fait-il ? Il attaque. Question de
tempérament, bien sûr : vous n'imaginez pas notre Président s'avouer
vaincu, et
gérer petitement la rigueur comme ses prédécesseurs. Question de
psychologie,
aussi : il sait que les dettes sont comme les promesses, elles
n'engagent que
ceux qui les paient. Parions d'ailleurs, contre tous les pronostics,
qu'il
trouvera le moyen de nous embarquer dans son emprunt, car rien n'attache
plus
qu'une reconnaissance de dette. Question de libéralisme, enfin : l'Etat
devra
réduire ses dépenses à proportion du montant des intérêts de l'emprunt.
Notre
Président, avec son grand emprunt, a tout simplement inventé la dépense
publique qui fait maigrir l'Etat. Et ça, c'est très fort !"
PRESSE DE LA MANCHE
Jean Levallois
"(...) Poursuivre une guerre idéologique qui consisterait à éradiquer le
capital serait de même nature que ces féroces guerres de religion où
catholiques et protestants ont cherché à s'éliminer, ou encore ces
guerres
franco-allemandes, pour se dominer mutuellement. Il faut vivre ensemble,
et le
capitalisme, réduit à sa mission de partenaire financier engageant des
fonds
dans une entreprise, pour lui donner les moyens de croître, est tout à
fait
honorable. À la condition, bien évidemment, pour reprendre la thèse de
la
participation, chère au général de Gaulle et à ceux que l'on nommait les
gaullistes de gauche, que ce soit l'homme qui soit au centre de
l'économie,
c'est-à-dire que ce soit l'économie qui soit au service des humains, et
que ces
derniers n'en deviennent pas les esclaves. (...) Une économie au service
de
l'homme, la reconnaissance exacte des composantes d'une entreprise,
d'une
société de services, d'une unité de production, c'est trouver loin des
guerres
idéologiques, une harmonie fondée sur la justice et le respect. Cette
vieille
idée neuve mériterait d'être pleinement mise en oeuvre."
JOURNAL
DE LA HAUTE-MARNE
Patrice Chabanet
"Le grand emprunt national dont Nicolas Sarkozy va dévoiler les
modalités
ce matin n'est pas si grand que certains au sein même de la majorité
l'auraient
souhaité. (...) L'exercice auquel se livrera Nicolas Sarkozy sera aussi
politique. En difficulté dans les sondages, le président de la
République devra
convaincre les Français que le grand emprunt est susceptible de donner -
enfin
- un bon coup de fouet à notre économie. Or le choix qui devrait être
confirmé
ce matin - à savoir le recours aux marchés financiers de préférence aux
particuliers - n'assure pas l'articulation entre grand emprunt national
et
grand élan national. Le grand public risque de ne pas se sentir concerné
directement. Le gouvernement devra donc rendre visibles très vite les
retombées
de cet emprunt. Cela veut dire une rapide affectation des fonds levés et
des
financements complémentaires par effet de levier. La rapidité dans ce
dossier
est devenue une priorité absolue, en évitant le piège du saupoudrage à
tout-va.
(...)"
CHARENTE LIBRE
Dominique Garraud
"(...) Le principal risque du grand emprunt réside dans l'émiettement
des
investissements préconisés dans le rapport Juppé-Rocard, dont Nicolas
Sarkozy a
déjà laissé entendre qu'il en suivrait les grandes lignes. Jean-Hervé
Lorenzi,
un économiste pourtant très favorable à l'emprunt, estime qu'il faudrait
"s'en tenir à un maximum de cinq ou six grands projets". Or avec une
multitude de vagues projets dont aucun n'est encore précisément ciblé,
hormis
les "campus d'excellence", dépenser plus pour gagner plus relève
davantage de l'économie casino que de l'investissement raisonné. Une
politique
à grand spectacle du panier percé qui promet un jackpot improbable. La
France a
certes besoin d'investir dans les technologies de pointe, mais le moment
est-il
bien choisi alors que l'incertitude reste complète sur le moment et
l'ampleur
de la reprise économique espérée après le tsunami de la crise
financière? (...)
Mais en attendant, une seule chose est certaine: une partie non
négligeable du
grand emprunt va encore alourdir la dette de l'État qui passer du record
historique de 8,2% du PIB cette à 9% fin 2010. Une perspective qui rend
irréaliste l'objectif intimé par Bruxelles à la France: repasser sous la
barre
des 3% au plus tard en 2013."
VOIX DU NORD
Matthieu Verrier
"C'est l'histoire d'un long pschitt, qui s'achève aujourd'hui. (...) Le
" grand emprunt " imaginé par le conseiller spécial de l'Élysée,
Henri Guaino, s'est mué en " investissements d'avenir ". L'idée est
retombée en feuille morte. Nicolas Sarkozy avait usé de la même méthode
pour la
suppression de la publicité sur France Télévisions. Énoncée abruptement
en
janvier 2008, l'ambition s'était confirmée un an plus tard. L'annonce de
Versailles s'est elle dégonflée politiquement. Tout ça pour ça ? Il
reste
toutefois un investissement supérieur au plan de relance. Et un coup de
fouet,
certainement, pour des secteurs qui prépareront l'avenir. C'est du moins
ce
qu'il faudra pour renflouer la " grande dette ", bien réelle."
Notre commentaire
Tout a-t-il
été dit avec ce « Grand Emprunt » ? J´en doute.
Les quotidiens français ont absolument raisons d´exprimer leurs
retenues.
Peut-on s´acheter l´avenir aussi facilement ? Certainement pas, surtout
si
dans cette crise on a été diablement surpris par le défaut d´épargne mis
à jour
par des acteurs économiques longuement établis sur la place économique
française
et même internationale. Pas assez de jugement et pas assez de prescience
sur la
nature et la violence de la crise qui les menaçait cependant depuis…plus
de 20
ans ! On joua à la bourse aux gains spéculatifs immédiats et faciles au
lieu de financer l´innovation et la créativité. Les pertes de
l´explosion de la
bulle des subprimes a mis tout le monde à mal. Et tous se tournèrent
vers l´Etat :
le dernier secours du naufragé banquier, marchands ou assureur…
Et
maintenant, le Grand emprunt pour mieux aller de l´avant et voir plus
clair dans le marécage de la crise économique et financière ; cela
va-t-il
réellement réparer les dégâts réels ? En tout cas l´idée n´est pas
mauvaise : quand on ne voit pas de solution actuelle précise, mieux vaut
préparer l´avenir parce que celui-là viendra à coup sûr. Et le mieux
serait qu´il
apporte de nouveaux produits et de nouvelles solutions soulageantes pour
l´industrie
et l´énergie…que de nouvelles impasses ! Mais cela marchera-t-il ?
Parce qu´après tout, ce sont de nouvelles dettes qu´on se fait en
espérant qu´elles
seront rentables demain. Tout dépendra en fait de la créativité et de
l´intelligence
industrielle économique pratique qui en résultera, car le contexte de
demain
sera bien dur pour l´occident avec l´entrée en liesse de la Chine et de
l´Inde
avec des prix industriels et commerciaux largement en dessous de ceux
des
occidentaux. Et ou l´oublie à tort dans cette affaire : nous avons
affaire
à une crise de la demande, pas à une crise de l´offre ! Ce sont les
acheteurs
qui manquent, pas les producteurs !
Aussi, à mon
sens, à défaut de savoir baisser les prix immédiatement pour
vendre (encore faut-il avoir des clients solvables), on veut gagner sur
l´innovation
avenir. L´idée n´est pas mauvaise d´autant que dans l´énergie verte, par
exemple et à force de s´encloîtrer au nucléaire, on a perdu une avance
considérable
sur les allemands. Mais est-ce pour cela que prix des produits
industriels français
vont être plus concurrentiels à l´avenir ? J´en doute. Je crois même
qu´avec
l´endettement public croissant, le niveau de vie élevé et celui des
salaires moyens
en Europe…les choses ne restent ce qu´elles sont. Or, réduire les
salaires pour
mieux vendre va appauvrir l´économie nationale et déséquilibrer l´ordre
social
occidental avec des conséquences…pour le moins désagréables. L´impasse. Oui, c´est
le
moins qu´on puisse dire. Car tant que les autres auront de meilleurs
prix face à
de revenus décroissants…l´Inde et la Chine auront la part facile partout
au
monde autant chez les pays industrialisés et riches que chez les pays
pauvres.
Avec ce Grand Emprunt on risque de ne pas avoir résolu le vrai problème
économique
essentiel…mais bien sûr on doit payer les intérêts négatifs de cette
dette quel
qu´en soient les résultats.
Musengeshi
Katata
"Muntu
wa Bantu, Bantu wa Muntu"
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