A un ami involontairement blessé

En guise d´excuse, mais aussi d´explication

Correspondance sincère et troublée

23.03.2006 sur le commentaire de l´article : 33% de français sont racistes 

Cher ami Le Troll,

Je suis sûr que ma dernière réponse à ton commentaire t´a surpris par sa violence, et cependant je pense, ou je m´imagine que tu peux facilement la digérer, parce qu´en réalité, tu es bien au dessus de vouloir vivre aux dépends de l´Afrique. Et malgré tout, cette passivité française devant le désastre évident de cette politique me répugne. J´espère bien attirer les français sur cette ignominie et leur faire comprendre qu´on ne peut pas parler de liberté, d´égalité et de fraternité et pendant ce temps assassiner les gens sournoisement pour revenir un jour vouloir les "sauver". Si tu as pris le rôle désagréable du bouc émissaire dans cette histoire, je le regrette vivement, et je suis pourtant persuadé que c´est en réalité la présomption qui pèse sur chaque français, parce que toutes ces saloperies son faites en son nom.

Je comprendrai qu  tu sois échauffé et peut-être choqué, mais il faut te dire que ceux qui subissent la francafrique, eux, ont bien mauvais sort. Nous devons arriver à crever cet abcès, et non à le discuter indéfiniment ou à le légitimer à la longue comme c´est encore le cas.

J´espère cependant que j´ai gardé, dans mon désespoir et celui des miens, le respect de ton amitié; quant à moi, la mienne t´est, sans le moindre hésitation, acquise. Mais notre combat auquel, j´en suis persuadé, tu t´associe sûrement, est tellement poignant et primordial, que je ne me crois pas tenu de te cacher la vérité. Et j´espère sincèrement que tu le comprendras. Un jour peut-être en rirons-nous, et j´espère que ce jour-là, la francafrique ne sera qu´un mauvais souvenir, et que nos enfants pourront fièrement, main dans la main, construire un avenir qui se garde de tels politiques sournoises.

Sincèrement, ton ami   

Musengeshi Katata

Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu

23.03.2006

Ami Le Troll, cher ami;

Je dois reconnaître que je t´ai vraisemblablement blessé et je m´en excuse profondément. Mais vois-tu, il m´arrive aussi d´être désespéré au devant des cris de détresse des miens que j´entends et que je vois. Peut-être suis-je plus sensible que le commun des noirs qui vit à Paris et qui dans sa naïveté croit avoir échappé au massacre invisible et sournois du maître occidental avec sa francafrique. Moi je suis resté enfermé dans ce tunnel noir, et avec les miens souffrant, saignant et criant à mes côtés, nous tentons de sortir d´un piège qui nous est mortel. Je t´avoue qu´il m´arrive de mal dormir; trop souvent, ces derniers temps. Cela me gâche le caractère, et pourtant, puisque je pense que je suis leur voix, le tambour de leurs colères et celui qui porte leurs revendications en place publique afin que ceux qui nous entendront nous rendent justice, mon sort est des plus impliqué. Trop souvent j´ai la sensation de buter contre un mur immense et infranchissable, et pourtant je dois m´y déchirer les mains, ainsi que tous les miens. Et dans mes moments de véritable abandon, quand je sens que l´espoir m´abandonne, je me retourne derrière moi et sans souvent les voir, je sens leurs souffles fatigués, éreintés, suppliants, et dans mon coeur enflé et au bord de la dérision, je les serre tous sur mon coeur, et ensemble nous faisons une prière profonde d´amour et de fidélité à la foi, à la liberté, à l´espoir. Cela nous réchauffe et nous console de la misère quotidienne. Je sais que plusieurs vont mourir, que beaucoup ne verront pas l´aube merveilleuse et fraîchement pure qui demain lèvera ses voiles sur nos souffles. Mais je sais aussi que nous ne sommes pas encore sorti de l´enfer.

Quoiqu´on dise, je resterai auprès d´eux et nous nous battrons pour sortir de ce sort inhumain. Le plus curieux c´est que je me suis rendu compte qu´en réalité personne ne peut nous aider; nous devons en sortir par nous-mêmes, et c´est un peu de consolation de faire un prière aussi brûlante que celle d´un Simon Kimbangu, par exemple, qui a pendant 30 ans subi la vile incarcération et le refus le plus ignoble de ses droits et de sa liberté. Lui était un Dieu, ceux qui sont autour de moi ne sont que des êtres humains, des enfants, des femmes faibles mais tous désireux de voir la lumière de la liberté et de se réaliser le plus pleinement que possible. Ce qui me blesse personnellement et me rend aigre, c´est de savoir que l´injustice, la rapacité et la cupidité humaine nous enferme dans un méprisant et combien inutile combat existentiel. Et lorsque l´un ou l´autre de ces êtres abusés et avilis me demande, en désespoir de cause si l´amour existe, il m´arrive de pleurer et de leur dire que oui, il existe bel et bien. Et c´est bien triste parce que parfois j´ai l´impression que tout ce qui est vrai est plutôt la haine que ce beau et noble sentiment.

Avec toute mon amitié,

Musengeshi Katata

Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu

07.04.2006

Cher ami, tu sais que j´ai été gravement refroidi du rein, ce qui m´a fait beaucoup souffrir, et cependant, j´ai eu à penser entre autre à toi. Ce que je disais en réclamant : même droit pour tous voulait simplement dire que tous nous avions droit à la liberté et à la réalisation, et qu´il n´y avait pas de raison à ce que la France ou quelque pays que ce soit, nous en empêche ou nous en obstrue l´ambition. Cela ne veut en aucun cas dire que nous nous réserverions le droit de commettre les mêmes crimes historiques ou de faire subir aux gens tous les viles et infamantes tortures que les français, et tous les peuples du Pouvoir Blanc se sont autorisés dans l´histoire envers les noirs. Nous ne sommes ni criminels à ce point, ni pervers. Et je préviens tous les africains qui se sont alliés à la francafrique ou tous ceux qui croient prendre exemple sur ces méfaits pour exercer les leurs qu´en ce qui me concerne, je réclamerai la corde pour eux et leurs amis. Sans la moindre hésitation. Parce qu´il n´y a pas plus méprisable que l´être qui se rabaisse à imiter la déchéance et le mépris de la bonté, plutôt que de défendre le bien, l´honnêteté, la saine et louable droiture. Et si nous parlons tous aujourd´hui de civilisation, de culture, de valeurs et de droits humains, alors cessons de nous assassiner comme des animaux en rage, et comportons-nous comme tels.

Amitié,

Musengeshi Katata

Muntu wa Bantu, Bantu wa Muntu

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