Les conclusions de la commission Lutundula
Un exemple congolais typique de surdité ou d´incompétence ?
Mettre fin au bradage illégal des richesses minières congolaises
« Si le Congo meurt, c´est toute l´Afrique qui bascule dans la nuit de la défaite et de la recolonisation »
Patrice Emery Lumumba, surnommé Osungu Odimba
En juin 2005, la Commission Lutundula, une commission spéciale de l’Assemblée Nationale, dirigée par le député Christophe Lutundula, a remis un rapport relatif aux enquêtes effectuées sur les contrats miniers et les autres contrats d’affaires signés par les rebelles et les autorités gouvernementales entre 1996 et 2003, lorsque la guerre faisait rage au Congo. Le rapport a constaté que des douzaines de contrats étaient soit illégaux, soit d’une valeur douteuse pour le développement du pays. Le rapport recommanda leur abrogation ou leur renégociation. Il recommanda également une action judiciaire contre un certain nombre d’acteurs de haut rang appartenant au monde politique ou à celui des affaires, impliqués dans ces opérations.
Avec un curieux retard de huit mois après sa remise au parlement, le bureau de l’Assemblée Nationale dirigé par Olivier Kamitatu, décida de diffuser le rapport à tous les députés bien qu’aucune décision n’ait été prise sur la date de son examen officiel par la chambre. Des sources locales rapportèrent que le retard de mise au rôle parlementaire était dû aux pressions exercées par des politiciens de haut rang cités dans le rapport et par des représentants des partis politiques principaux, qui souhaitaient l’enterrer avant les élections prévues en mai. La discussion concernant ce rapport fut repoussée par deux fois par l’Assemblée Nationale et risque d’être repoussée ultérieurement à cause d’un programme parlementaire chargé.
Q´est-ce qui fut plus important que l´examen des conclusions de cette commission, car, ne soyons pas aveugle, toutes les causes de la guerre civile congolaise, des querelles armées et sanglantes de petits, moyens ou prétentieux rapaces seigneurs de guerre ; c´était justement ces contrats illégaux d´exploitations minières illégitimement contractées au détriment de l´intérêt du peuple congolais et de son développement. Les sociétés étrangères qui s´abaissèrent à ce bas et sournois marché sont aussi celles qui fournirent les armes avec lesquelles leurs marionnettes, pour justifier ou assurer leurs fallacieuses intentions, créèrent le désordre dans lequel il serait plus aisé d´asseoir, pensaient-ils, leurs opulentes traîtrises. « Pendant des années, déclara la coalition d’organisations non-gouvernementales, de douteux hommes politiques au Congo ont conclu des contrats qui les enrichissaient mais n’apportaient aucun bénéfice au peuple congolais. Les profits tirés de tels contrats ont souvent été obtenus au prix de souffrances et de pertes humaines énormes. Le parlement doit examiner à la loupe les conclusions de la Commission Lutundula et tenir les acteurs politiques pour responsables de leurs actions avant l’arrivée des élections. »
Lors de cette enquête, certains membres de la commission ont été menacés et ils se sont heurtés à des hommes politiques, des responsables et des décideurs dans les entreprises qui refusaient de répondre à leurs questions. Malgré le soutien apporté par la Banque mondiale au travail de la commission, un certain nombre de pays et d’organisations internationales ont également refusé d’apporter leur assistance à la commission. Des responsables des Nations unies et du sénat belge, deux instances qui ont enquêté sur l’extraction des ressources naturelles au Congo entre 2000 et 2003, ont refusé de communiquer des informations importantes sur certains des contrats illégaux, sous prétexte de confidentialité.
Etablie par les accords de paix de 2003, la Commission Lutundula comprenait des représentants de toutes les principales parties au conflit. La commission a évalué la légalité des contrats initiés par les anciens belligérants et leurs effets possibles pour la nation. Dans son premier rapport, la commission recommanda que 16 contrats soient abrogés ou renégociés et que 28 compagnies congolaises et internationales fassent l’objet d’une enquête pour violations du droit congolais. La commission recommanda également que 17 personnes soient traduites en justice pour fraude, vols et autres chefs d’inculpation. Un second rapport détaillant les coûts financiers de la guerre devrait bientôt être soumis plus tard par la commission.
« Lorsque les accords de paix ont été signés, déclara la coalition d’ONG internationales toutes les parties sont tombées d’accord pour enquêter sur ces contrats. Maintenant que la commission a mis en évidence des preuves de corruption et d’abus, les responsables congolais doivent s’attaquer franchement au problème, « Le parlement doit rapidement inscrire le rapport de la commission à l’ordre du jour de ses activités et agir sur la base des recommandations formulées avant la fin de la période de transition. »
Rien n´en fut, bien au contraire silence et obstruction complète sur cette affaire. En désespoir de cause, Christophe Lutundula, deuxième vice président le l´assemblée nationale, tenta lors de son voyage au Bénin, d´essayer, de l´extérieur d´attirer l´attention sur la surdité volontaire et le blocage constitutionnel fait autour de cet éminent rapport. Peine perdue : il fut empêché de voyager le mercredi 16 février 2000 par les agents de la Direction Générale des Migrations (DGM)/aéroport de Kinshasa – Ndjili au moment où il voulait se rendre à bord d’un régulier de CAMAIR à destination de Cotonou/Bénin. Son passeport et son billet d’avion furent confisqués. Voulant en savoir plus face, il lui sera répondu que ses documents ont été envoyés pour décision auprès de M. Djuma Hadisi, directeur général de la DGM.
Toute cette affaire ne prouve qu´une chose : la corruption et la haute complicité du gouvernement et des institutions étatiques sous Joseph Kabila Alias Kanembé Kasemberembe dans le pillage et la déstabilisation institutionnelle du Congo. Et tous ceux qui ont participé ou laisser faire cet état des choses, se sont rendus coupables de traîtrise envers leur peuple et envers les 3,5 millions de morts innocents qu´a causé toute cette période de troubles et de criminels desseins.
Maintenant, je crois, tout le monde comprend mes appréhensions et mes réserves envers les hommes politiques congolais dont beaucoup, à quelques jours des élections, veulent se faire passer pour des lumières politiques ou des intellectuels conscients et avertis de leurs devoirs. Quand on ne sait même pas saisir le principal, comme je l´ai toujours dit et le régler au plus urgent, on cafouille, tout simplement dans le subsidiaire et les apparences. Et tous ceux qui s´évertuent aujourd´hui à paraître talentueux et pleins de bonnes intentions ne sont rien d´autre que de grands menteurs et d´incapables notoires, parce qu´à aucun moment ils n´ont saisi la teneur et la portée de leurs devoirs envers le peuple dont ils se réclament tous aujourd´hui avec une fausse passion.
A l´aube de ces élections que tout le monde occidental qualifie d´exemple directif pour l´avenir non seulement du Congo mais de l´Afrique entière, et malgré toutes les erreurs, les manipulations et les faussetés qui ont été faites autant à l´intérêt qu´à l´avenir du peuple congolais, je voudrai ici lui demander de garder la tête froide et de se choisir des représentants dignes de confiance et capables de réaliser ses attentes. Personne ne peut empêcher un peuple de se suicider en produisant, à la longue, dans notre monde complexe, rapide et cupide actuel, des bourdes inconscientes qui minent son avenir et détruisent les espoirs les plus impatients de ses enfants. Personne. Car le peuple est souverain et sensé être diligent envers lui-même. C´est pourquoi je ne peux qu´en appeler à son bon sens et à son amour pour lui-même.
Méfiance, méfiance et encore méfiance ; telle est mon conseil. Ces occidentaux qui arrivent et veulent chacun défendre leurs intérêts à user et abuser de nos matières premières ou s´activer à garder la mainmise sur notre marché national de consommation ne poursuivent que leurs besoins et leurs visions étroites et rapace de l´Afrique et particulièrement du Congo. Tout ce qu´ils nous proposeront ou nous apporteront, ne vaut pas ce que nous nous souhaitons nous-mêmes. Il suffit d´aller dans l´histoire pour en apprécier de leur amour envers nous. Seul notre détermination, l´organisation ambitieuse de notre propre devenir peut ouvrir notre avenir à sa véritable vérité. Et si certains ne savent pas de quoi il s´agit réellement ou hésitent devant un rendez-vous aussi important, qu´ils ferment les yeux et repassent en silence tout le scénario des évènements qui se sont produit depuis le départ de Mobutu ; et se demande : comment puis-je m´engager sans me ruiner, aliéner mon avenir et celui des miens ? Et dans ce moment je souhaite vivement que l´amour que chacun a de lui-même, de la paix, des siens et de la libre et souveraine réalisation de cet immense et beau pays lui vienne en aide et l´aide à trancher. Librement, mais consciemment. En toute souveraineté. Pour aujourd´hui, demain, et pour un avenir sans guerre, sans misères ; pour une vie de liberté, de travail et d´espérance vécues et réalisées. Car mieux vaut faire la liberté, la démocratie, et jouir de leurs fruits délicieux et tendres que de les subir passivement ou se les entendre conseiller à longueur de décennies pendant que nos femmes et nos enfants mourraient de faim et d´apathie, et que nos intellectuels et techniciens quitteraient amers notre pays pour l´occident.
Musengeshi Katata
Muntu wa Bantu, bantu wa Muntu