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29 juillet 2006

En réponse à la lettre de Yumbi

Réveiller cette Afrique qui s´ignore ou se méprise

Au-delà des mots, des faits et du silence : la vérité

« L'important n'est pas ce qu'on fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous. »   

Jean-Paul Sartre

Chère Yumbi, je te remercie vivement pour ta lettre ; note que j´aurai préféré que tu la postes sur ma page, afin que d´autres puissent prendre connaissance de ton tourment, de tes questions, et peut-être se reconnaître dans tes aspirations qui sont tout à fait légitimes et louables. Je t´avoue que je n´ai personnellement pas beaucoup d´admiration pour des gens qui n´ont pas le courage ni de leurs opinions, ni de leurs prises de position. Et les africains, par leur silence dans les sujets ou des débats qui les concerne au plus haut point, et même si c´est par timidité, donnent toujours l´impression qu´ils ne sont pas encore à la hauteur de discuter ou de défendre leur droit à la libre existence, leur culture ou leurs propres intérêts. Se taire, c´est souvent acquiescer, laisser faire. Ne rien dire, lorsqu´on est concerné directement à court ou à long terme, c´est faire preuve d´un manquement qui défie tout entendement, parce qu´il tronque le débat ou la construction d´un avis discuté et partagé. Et pour une culture qui, de l´esclavage des musulmans à celui des occidentaux en passant par la colonisation et la francafrique d´aujourd´hui, l´homme noir et sa culture ont toujours été interdit à la parole, à la discussion, à la réalisation de sa vision de l´histoire. Ce qui s´ensuit, tu le sais : il a été dominé, contraint à subir la culture, le système et les dispositions que lui imposaient le maître. Certes, des noirs se sont révoltés : Zumbi, Patrice Lumumba, Joseph Tchundjang Pouémi, Englebert Mveng Walter Rodney, Malcolm X. Martin Luther King, Toussaint Louverture…tous furent traîtreusement assassinés. Et pour cause : cette culture occidentale qui nous vendait la « civilisation » et la « démocratie » ne supportait pas la liberté ou l´autodétermination des noirs ! N´est-ce pas curieux que certains d´entre nous croient aujourd´hui que parce qu´elle dominait par la violence militaire et par sa richesse (Note que cette richesse a été en grande partie avec le sang et la sueur obligée des nôtres, ne l´oublions pas.) qu´elle est ou est devenue notre seul exutoire de réalisation. Mais alors, pourquoi a-t-elle commencé par l´esclavage, par le meurtre et le viol ? Tous les occidentaux qui en profitaient aujourd´hui, surtout les anciens communistes de l´Est européen, avaient-ils fait autant de sacrifices que les africains ? Non, n´est-ce pas ! Voilà pourquoi, tous ceux qui se taisent en tant qu´africains, me sont suspects et repoussants, parce que je me demande si c´est par ignorance (ce qui est criminel et irresponsable au regard de notre histoire, de nos souffrances passées), ou c´est par immoralité (parce que j´ai peur qu´ils ne soient en train de cogiter les mêmes crimes, les mêmes exactions que les maîtres occidentaux leur avaient si bien inculqué le goût.

Pourquoi je parle ou j´écris sur l´occident, alors que l´Afrique a besoin de plus d´attention ? D´abord je parle toujours de l´Afrique, même lorsque j´écris sur l´occident. Beaucoup de correspondants m´ont fait cette remarque ; et cependant ils oublient que conséquemment ou subconséquemment à l´esclavage, l´homme noir a été dispersé dans le monde entier, au gré de son utilité économique. Par ailleurs, du fait de la domination occidentale sur l´économie et les finances du monde, ce qui se passe en occident a une incidence directe ou indirecte sur l´Afrique. On oublie souvent, et cela me déçoit profondément que l´esclavage a eu lieu parce que les arabes ou les occidentaux avaient un besoin économique qu´ils résolurent de cette barbare façon. Plus tard, lorsque les mêmes acteurs eurent besoin de terres, de matières premières ou de consommateurs pour leurs industries surproduisantes, ils revinrent et ce fut l´ère de la colonisation, de l´Apartheid en Afrique du Sud, de la mainmise sur l´Australie. Si personne ne l´a encore compris, c´est qu´il n´a rien compris du tout. Il ne s´agit pas « seulement » de racisme, comme tu le dis ; il s´agit d´économie, de réalisation. Le tout attisé évidemment de racisme, mais ce n´est qu´un moyen pour noyer son chien. Le but poursuivi, lui, reste celui de domination ou de chosification à des buts économiques.

Pour ce qui est de la religion chrétienne et de la complicité avec le capitalisme barbare et primitif du Pouvoir Blanc, je maintiens que cette religion est comme le disait le grand Simon Kimbangu, qu´elle représente une aliénation destructive pour la race noire, parce qu´elle lui fait croire à un Dieu blanc, tout en détruisant sa spiritualité culturelle originelle et en inculquant d´accepter et de supporter tous les méfaits faits par les blancs au nom d´une religion hégémonique de morale et d´éthique réservée à la race blanche. Et toute domination qui, comme l´occidentale, détruirait l´identité culturelle, spirituelle d´une culture, d´un peuple pour la remplacer par sa négation ou sa soumission, est à mon sens une domination des plus criminelle, parce qu´elle détruit une valeur légitime incessible. Et plus elle s´évertue à perpéterisante  plus elle devient mplus criminelle qu ou de chosification vinrent et ce fut luer ses méfaits, et plus elle devient méprisante et vile.

Maintenant, comment retourner en arrière ? Je parle de tous ces africains chrétiens qui, comme le disait Léopold II : « Bons chrétiens, bons crétins ! », jouent bêtement l´aliéné heureux, que ce soit aux Etats-Unis, en Afrique ou ailleurs, je ne peux que leur recommander un retour à l´authenticité, comme le prônait le dictateur congolais Mobutu Sese Seko. Je sais, c´était un dictateur, mais sur ce point de vue, rendons-lui justice, il n´avait pas tort. Ceux qui malgré tout continueront à croire au christianisme (la bêtise est partout, surtout chez les ignorants) ; je leur recommanderai d´exiger une reconnaissance immédiate sur tous les plans. Ils verront alors qu´en réalité, comme le disait Sartres : « On nous a appris à chanter les louanges de Dieu pour nous faire oublier que nous étions des hommes ». Cette phrase, je l´emploie ici pour exiger une humanité et une reconnaissance à la libre réalisation. Elle comprend autant la tolérance que le respect de l´intégrité et la souveraineté des autres.

Maintenant, dis-tu, beaucoup de noirs et d´africains, par ignorance ou par aliénation se mettent eux-mêmes la corde au cou ou s´entravent expressément la voie de la liberté ou faussent les conditions menant à des résultats réels de libération. Et tu as pleinement raison : ces petits dictateurs de la francafrique qui ruinaient et appauvrissaient ce continent, l´empêchant ainsi de combattre l´analphabétisme, de produire par des techniciens locaux les moyens urgents de biens sociaux de développement, y sont pour beaucoup. Il en va ainsi aussi de ces illuminés incapables qui, n´ayant aucune notion ni du pouvoir ni de ses obligations, s´emparaient du pouvoir et ramenaient leur pays dans la préhistoire plutôt que de le faire avancer. Ou tous ces élites castrées ou corrompues qui, ne sachant pas organiser et réaliser leurs peuples, les vendaient au plus offrant, pourvu qu´ils en tirent bénéfice personnel ou qu´ils exercent le pouvoir indéfiniment, tout simplement. Je sais, c´est triste tout cela. Mais ne reprochons pas toujours à ceux qui gouvernent de manquer de talent ou de vision adéquates de leurs devoirs ; s´ils ont été élus, le peuple qui les a choisi en porte aussi les responsabilités. Par ailleurs, aussi douloureux que ce soit, le peuple doit aussi apprendre à se débarrasser de ses défauts (ignorance ou traditions sottes ou primitives) pour accéder à une meilleure rationalité, et réaliser ou concourir ainsi à un haut niveau d´idéal existentiel. A mon avis, nous sommes tous concernés. Dans la victoire comme dans l´échec ; par les efforts autant que par les buts. Ceux qui croyaient que l´immigration, l´exile, leur égoïsme personnel ou même leur traîtrise les libéraient de tout devoir envers eux-mêmes ou les leurs, se trompaient lourdement : un jour, on leur rappellerait qu´ils sont noirs. Et ce jour-là ils devront s´avouer que le racisme n´était pas encore vaincu en occident ; bien au contraire, avec la crise économique, il poussait comme de la mauvaise herbe.     

Le rêve et la volonté de liberté, en ce qui concerne l´homme noir et l´Afrique est-il un rêve chimérique, des élucubrations d´illuminés ? Pas du tout ; note que ce ne sont pas les noirs qui se mettent au balcon ou à la plage pour bronzer aussitôt un petit soleil à l´horizon…ou encore, ce n´est pas la race noire qui a fait l´esclavage des blancs, mais bien le contraire. Pourquoi ? La race blanche n´était-elle pas assez résistante ? D´autre part, les occidentaux parlent souvent de leur liberté et de leur démocratie dont ils veulent abreuver ou convertir le monde entier ; celle-ci ne serait-elle valable ou ne respecterait-elle que les valeurs occidentales ou serait-elle aussi capable de respecter et, ou intégrer dans sa logique les valeurs des autres ? Si c´est le cas, pourquoi donc s´acharnait-elle à étouffer, détruire les valeurs et l´indépendance ou la souveraineté des autres ? N´est-ce pas antidémocratique et pervers ? Je le pense bien, et il serait temps que les gens s´en rendent compte.

Encore une fois pour tous ceux qui l´ignorent : les toilettes nous viennent de la Turquie ; lorsque le château de Versailles fut construit, il n´existait ni latrines ni toilettes. Les nobles aristocrates se soulageaient dans tous les coins de cette illustre bâtisse, et les serviteurs, avec des pots, faisaient le ramassage des excréments. Le vin vient d´Egypte, la poudre à canon de chine, le café d´Ethiopie, la pomme de terre du Pérou ainsi par ailleurs que le caoutchouc. Le papier ou papyrus venait d´Egypte, l´imprimeuse et la voiture d´Allemagne…le tracteur, lui, venait de Russie, l´électricité de Thomas Edison, des Etats-Unis, la pénicilline de France, par Louis Pasteur. Je veux dire par là que c´est le développement des cultures et des diverses créativités  culturelles qui ont fait et enrichi notre civilisation humaine, ce qui veut dire que nous avons le devoir de respecter les autres cultures, mais nous devons aussi nous en inspirer et, dans la mesure où elle nous enrichit et nous émancipe, en faire nôtre. La liberté n´est pas un lieu de domination gratuite et dictatoriale, mais un consensus respectant l´éclosion et la liberté de tous. C´est la thèse de la Réalisance. Se réaliser librement n´exclut ni la coopération, les relations de solidarité, ni la responsabilité partagée du respect de la liberté et de la réalisation des autres. Mais il n´est en aucun cas question de dominer pour imposer ses vues, ses intérêts, ses abus même au nom d´une quelconque démocratie ou liberté hégémonique.

Ceci dit, je crois avoir répondu à tes questions. En espérant que mes réponses te satisferont ou t´aideront à trouver les tiennes, je te prie de croire à ma sincère sympathie.

Musengeshi Katata

Muntu wa bantu, Bantu wa Muntu

munkodinkonko@aol.com

               

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