Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Forum Réalisance
Forum Réalisance
Publicité
Archives
Newsletter
9 août 2006

Sur l´avenir de la RDCongo

En réponse à Ntalaja

Théâtre truqué ou théâtre faussé; où est l´enjeu ?

« Bidi tenta kuetu, anu ne keba peba »  Proverbe Luba

Chère Ntalaja, tu as touché dans le mille en disant que la classe politique congolaise réfléchit bien et agit mal, ou réfléchit mal et agit bien ; et que dans l´ensemble c´est une classe déjouée qui n´arrive pas à imposer l´idéal de paix et de réalisation des congolais. C´est pourquoi on se demande si on ne devrait pas s´en débarrasser le plus vite que possible en la remplaçant par une classe plus avertie, moins corrompue. Note que ce n´est pas seulement au Congo ; depuis que la francafrique a étendu ses tentacules en Afrique, et comme un insatiable vampire suçait à grosses pompe le sang des africains, ceux-ci s´affaiblissent de jour en jour et perdent le sens d´orientation de leurs facteurs de développement. Dans le livre Powernomics que je te recommande vivement si tu sais lire l´anglais (et pas seulement lire, hein !), pour la première fois depuis longtemps j´ai entendu un noir, dans la bonne tradition d´un W.E.B Du Bois, parler d´éducation et d´instruction comme instrument incessible et primordial pour réhabiliter et engranger le niveau créatif des noirs américains. En Afrique, on a plutôt suivit ou adopté le système de formation et d´instruction des anciens colonisateur, par manque d´inspiration ou tout simplement parce que cet important et décisif problème de l´évolution sociale, à l´indépendance, n´était pas encore pris au sérieux. Il faut dire, avouons-le franchement, que tous ceux qui se précipitèrent au pouvoir jadis, nageaient bravement dans l´ignorance la plus illuminée sur les véritables devoirs du pouvoirs. Il ne s´agissait pas d´une simple remise-reprise ; il s´agissait d´un changement d´orientation qui devait mettre en valeur les intérêts et les idéaux des africains. A tous les points de vue. Et pas seulement par un simple changement du personnel colonial par un personnel autochtone. L´instauration d´un système d´organisation et de son esprit de réalisation et d´ambition a fait cruellement défaut. Ce qui a eu pour résultat que se substituant à l´élite coloniale sans avoir de nouveaux concepts sociohistoriques, ces nouveaux venus se retrouvèrent dans les chaussures de leurs anciens colonisateurs et s´y accrochèrent par défaut de système et de logique organisée autour d´un esprit ferme d´un idéal clairement défini. La francafrique les cueillit comme des fruits mûrs qui ne demandaient qu´à être dévoré.

Les noirs n´aiment pas l´effort de la réflexion, dis-tu ; ils préfèrent les voies faciles et superficielles du moindre mal ? Pas toujours, dirai-je ; mais beaucoup trop souvent c´est le cas. Le problème est que le système occidental reproduit dans son organisation ses motivations et ses tendances sociohistoriques de réalisation ; notre système hybride et désorienté par contre, pas du tout. Ce qui crée ces distorsions qui produisent des instruits suivistes, castrés de la créativité individuelle, et désorienté par rapport à l´objectif premier de leur raison d´être : épanouir, développer et défendre leur culture. Et si par surcroît la tendance dominante incitait à l´obtention d´un poste administratif dans la fonction publique (cols blancs), plutôt qu´à mettre sur pied un projet de production ou d´innovation, le tour était joué, l´instruit n´était plus autre chose qu´un instrument de la dépravation sociale au lieu d´être celui de son soulagement ou de sa meilleure réalisation. Et tous ceux qui aimaient parler de leur culture tout en parlant la langue du maître, en roulant dans ses voitures, en employant sa logique et ses intentions devraient se demander s´ils savaient réellement ce que c´est que la culture ! Tout cela donnait l´illusion d´une prostituée qui mangeait à tous les râteliers et qui, le dimanche, en robe blanche allait clamer à gorge déployée sa vertu. Pour tromper son monde vraisemblablement, ou faire bien ; car dans la foule, ses clients assidus en pouffaient de rire. Cette fausseté ! Mais remarque : la prostitution est depuis quelques temps reconnue en Europe ; les américains, eux, comme toujours, tout en la condamnant, n´en sont pas moins le plus grand pays exportateur d´articles pornographique du monde !

Pour en revenir à nos élites, ils ont aujourd´hui difficile à unifier les deux faces du même visage de l´Afrique : l´une est primitive, analphabète, pauvre et vit encore dans des cases en terre battue ; l´autre, instruite ou citadine (ce qu´on peut appeler cité en Afrique), était plus une mauvaise projection occidentale sans âme, que celle de l´autre partie attardée qui était sa source et son bassin culturel. L´un veut aller vers l´autre mais se refuse à renier son legs culturel ; l´autre s´éloigne de sa propre projection pour jouir de l´image de civilisé et de progrès que lui donne la consommation des produits occidentaux, leur langue et leurs usages. Et cependant que progrès, civilisation ou développement impliquaient que l´une réalise l´autre et vice versa. Le devoir de l´élite africaine est donc d´harmoniser ces deux visages et leur permettre de jouir d´une culture qui répondait autant à l´un qu´à l´autre. Et c´est là que la nouvelle élite africaine cafouille, parce qu´elle n´y arrive pas. Les raisons ?

Aliénation, incompétence, corruption, arrivisme, superficialité, déculturation ? Toutes ces raisons se mêlent et s´entremêlent autour de la stagnation actuelle de l´Afrique. Et contrairement à ce que les gens pensent, l´Afrique n´est pas pauvre ; c´est plutôt l´africain qui est pauvre d´esprit. Au lieu d´employer ses richesses pour son avenir, elle les brade pour des bibelots qui, tout en lui donnant le faux sentiment de se réaliser, lui prive de moyens avenir de développement. Et si certains croient que lorsque les instruits quittent l´Afrique, que celle-ci ne produit ni voiture, ni machine à coudre ou à laver, c´est l´avenir, tout va bien…Il faut bien être aveugle ou borné pour le croire. C´est tout simplement un état injurieux de la stagnation.

Sur le Congo que je connais bien, j´ai fait des remarques qui m´ont profondément révolté. Par exemple un jeu de fourche flambant neuf pour tracteur rouillant devant une demeure cossue à la 15ième rue, à Limété. N´importe quel paysan européen se serait empressé de mettre à l´abri ces instruments de production. En Afrique où on abandonnait l´agriculture aux analphabètes, alors que partout dans le monde cet important secteur de l´économie sociale, en pays sous alimenté, on les laissait rouiller sous la pluie. La maison appartenait à un député mobutiste…rien d´étonnant. Cela me fait penser à la crise de colère irresponsable et inconsciente de Mobutu qui offrit, sans contrepartie le paquet d´action de 25% que possédait le Congo-Zaïre de la société aérienne belge Sabena d´une valeur de plusieurs centaines de millions de FB ! Le portefeuille de l´Etat zaïrois perdit ainsi sous cet acte de bantouisme illuminé une fortune. Et lorsqu´on voyait aujourd´hui la population crever de faim et se massacrer à qui mieux mieux ; je me demande si ils se rappelaient avoir élu ce dictateur à plusieurs reprises !

Vouloir changer les choses, c´est aussi être objectif, et naturellement connaître son problème et avoir le talent d´y apporter des solutions efficaces. Et même si l´occident veut nous réduire de nouveau à l´esclavage libre avec Louis Michel, si nous nous y refusons adéquatement, au risque de perdre un enjeu important, ils vont composer et revenir à des attitudes respectueuses de nos intérêts. Beaucoup de Congolais se sont opposés aux votes, or le vote n´est qu´un instrument ; bien utilisé, il peut imposer la volonté souveraine du peuple en choisissant des élus dont le premier devoir est le respect et la réhabilitation de la souveraineté nationale, de l´ordre, de la paix et du travail aux vœux résolus de la Nation. Même les occidentaux ont intérêt à ce que ce pays retrouve sa stabilité avec un ou des élus répondant á la volonté du peuple, plutôt que d´entrer de nouveau dans une période d´insécurité et de guerres civiles. Ce n´est pas une ambiance propice à des extractions paisibles. Par ailleurs, si le Congo n´arrive pas rapidement à produire un bien être moyen partagé, les révoltes s´enflammeront de nouveau. Personne ne gagnera dans la précarité et l´insécurité sociale ; pire : les investisseurs craignent de perdre leurs capitaux et restent à distance. C´est bien connu. Autrement dit, les temps sont peut-être propices pour un bon départ, un meilleur Congo : un Congo qui quitte l´infantilisme et devient réellement indépendant par son travail et son talent. Tout le monde l´a-t-il compris ? Bonne question. L´avenir du Congo, c´est la réalisation de tous ses enfants selon leurs intelligences et leurs capacités car ce pays est le leur. Pas celui des belges, des français, des allemands, des américains ou de qui que ce soit d´autre. Après tout ces gens ont tous leur pays, et nous n´y allons pas faire la loi ou s´emparer injustement de leurs biens, n´est-ce pas ! 

Et cependant, croire qu´on va aller au paradis sans intégrer l´autre partie analphabète et ignorante du visage du peuple aux ambitions de l´avenir, c´est l´erreur la plus grossière qu´on puisse faire. Le système d´éducation en Afrique est défaillant, peu pratique, plutôt généraliste et superficiel qu´orienté et précis. Une plaie incroyable dans toute logique efficace de développement. A la fin, je crois qu´il faut un standard de valeurs d´éducation et d´instruction à un pays ; sinon, au lieu de lire de créer, de se consacrer à produire, les gens intelligents se battent à longueur de journée avec des gens d´une grossièreté qui dépassait tout entendement, aux manières primitives et révoltantes avec lesquels tout dialogue, toute tâche ordonnée et précise tournait à la catastrophe. Et c´est dire que si l´élite africaine veut atteindre ses buts, elle doit apprendre à former ses enfants et ses citoyens sur les objectifs visés et leurs impératifs. Avec le plus grand détail, et non sans ambition. La liberté: il vaut mieux la concevoir et la réaliser que la subir ou l´acheter en prêt à consommer, car elle pourrait être plus amère qu´agréable et réalisante.  J´espère que j´ai répondu à ta lettre. Fraternellement,

Musengeshi Katata

Muntu wa bantu, Bantu wa Muntu

munkodinkonko@aol.com

                         

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité