Sur le livre "Vers la deuxième indépendance du Congo" de Colette Braeckman
Au premier abord, rien de spécial qu´une
journaliste belge écrive sur le Congo ; depuis la colonisation, les belges
ont pris l´habitude de vouloir régenter la politique de leur ancienne
colonie…avec une évidente objectivité boiteuse qui en oubliait par trop souvent
à voir la poutre géante qui débordait de leurs intentions subjectives, malgré
tout, à conformer l´avenir de ce grand pays africain riche en matières
premières à l´utilitarisme intéressé qu´en feraient la Belgique et l´occident pour
son avenir.
Quel est
l´intérêt réel du LIVRE : « VERS LA DEUXIEME INDEPENDANCE DU
CONGO » DE C. BRAECKMAN
Si nous nous
orientons seulement sur la phrase de Senghor le 7 janvier 1977 à "Jeune
Afrique" : « Aujourd´hui on est colonisé et on ment au peuple qu´on est
libre », on peut sans la moindre hésitation dire que Colette
Braeckman a raison, seulement, sa visible et subjective sympathie pour Kabila,
ainsi que le fait que tout en étant belge, elle n´arrive pas à sortir de sa
peau pour voir les choses plus objectivement ; ce qui fait de ce livre un
pamphlet à la désorientation et à l´assimilation, plutôt qu´il ne débat réellement
de ce que pourrait être une deuxième indépendance congolaise. Notons qu´elle n´a
pas tellement tort en faisant entrevoir entre autre l´échec de l´indépendance
de 1960 (avec l´assassinat de Patrice Lumumba, notons-le bien) et la nécessité
d´une nouvelle orientation réparant les erreurs et les manquements du passé
pour en venir réellement à une indépendance effective. Et sur ce dernier point
de vue que d´une part comme de l´autre. Congolais et belges ou même
curieusement Colette Braeckman pour une journaliste, tout le monde s´égare à
loisir ou s´évertue sciemment à tromper son monde en prétendant cependant présenter les choses
comme elles devraient l´être.
Et ici Colette
Braeckman n´échappera pas à la critique objective tout court. Pas parce qu´elle
se mêle, en belge incorrigible aux affaires des autres, mais parce qu´apparemment
elle ne sait ni ce que c´est que l´indépendance économique et politique tout
court, ce qui est assez étonnant parce que son propre pays la pratique et l´entretient
avec ou sans l´Union Européenne. Elle admet certes l´échec de l´indépendance de
1960 comme nous, mais par subjectivité culturelle, elle dirige cette nouvelle nécessité
d´indépendance…vers la dépendance et la domination du RDCongo par la Belgique tout
simplement. Pourquoi ? Parce qu´elle veut encenser les bons rapports entre
la Belgique et le RDCongo sans tenir compte d´un élément fondamental de l´indépendance :
l´exercice responsable, conscient et conséquent du pouvoir économique, éducatif,
culturel de la part de l´élite congolaise. Or, cet exercice a été sciemment torpillé
par la Belgique en 1961, ceci a même été la raison pour laquelle Patrice
Lumumba a été assassiné avec, rappelons-le, la complicité autant
occidentale que congolaise : empêcher à tout prix l´exercice d´un pouvoir indépendant
et averti au Congo afin, comme ce fut le cas dans toute l´Afrique des années ´60,
d´installer une dépendance économique effective à l´occident laquelle fut
garnie, comme on le dit bien Senghor, d´un exercice artificiel et trompeur du
pouvoir.
Maintenant, si une nouvelle indépendance s´impose, ce qui est
absolument le cas, que faut-il donc changer ou encore, quelles sont les erreurs
d´infantilisme ou de naïveté que les africains et partant les congolais, on
fait ? L´une des erreurs fondamentale est de ne pas avoir orienté, dès l´indépendance,
l´éducation instructive, critique et culturelle vers une identité culturelle et
des nécessités rationnelles répondant aux besoins et aux aspirations des
africains eux-mêmes. Les livres, les maîtres d´écoles, les structures
cognitives et critiques de la rationalité devaient refléter les tourments, les
obligations et les attentes des sociétés africaines afin de leur permettre,
dans un rapide effort intentionnel, à vaincre leurs retards économiques,
techniques, scientifiques le plus rapidement que possible, et ainsi, se réaliser
plus aisément dans l´ère contemporaine exigeante économique et productive d´aujourd´hui.
Or, que voit-on,
pendant que les universitaires, médecins et hauts techniciens devaient, sous le
chômage chronique qui les menaçait (dans un pays où tout manquait pratiquement,
il faut bien se le dire !), quitter leur pays et immigrer en occident, ce
Congo de Kabila n´arrivait ni à organiser effectivement la gestion de la chose
publique, ni à orienter son esprit et ses facteurs déterminants vers la création
d´emploi par lequel l´accumulation et l´organisation sociale accomplissaient
leur meilleur gestion de l´épanouissement social. Chanter les louanges d´un tel
anarchisme politique et économique ne témoigne-t-il pas d´un opportunisme
intellectuel blessant envers la raison et le bon sens ? Certes la Belgique
devait se garder d´être paternaliste envers le pouvoir et l´élite congolaise,
mais on attendait d´une journaliste nettement plus qu´une fausse objectivité
derrière laquelle le beau verbe ne cachait qu´un petit discours embusqué de
colonialisme, ou une dialectique de support aveuglé au charlatanisme politique le plus outrageant ruinant un pays à vue d´oeil et appauvrissant sa population insolemment.
Apparemment, et comme par le passé, on se réclamait de la liberté, de la démocratie
et du bien-être tout en la refusant astucieusement aux africains pour, comme hier, les endormir
et les assujettir encore une fois. C´est à se demander: nouvelle décolonisation pour quoi faire, si les choses restaient comme par le passé ? On ne voyait les choses que du côté où son
pain est beurré. Les africains et leurs élites, devaient-ils se prêter, dans
leur naïveté ou leur aliénation à ce faux jeu ? Non, s´ils étaient réellement
de l´élite de leurs pays.
Nous sommes
persuadés, et d´autant mieux avec la crise économique actuelle, qu´il ne s´agit
pas, comme par le passé de transformer les africains en zombies ou en esclaves
de l´industrie et de la société de consommation occidentale, mais bien de
critiquer et d´aider les africains à se retrouver eux-mêmes. Et cela veut dire
que l´élite africaine doit exercer ses prérogatives et ses devoirs envers les
siens avec la plus grande fidélité et la plus grande assiduité. Parce que c´est
la seule manière d´épanouir et de développer rapidement la créativité et la
production des leurs, ce qui, comme on le sait, permettra à ces derniers de
devenir des clients valables pour l´occident. Et vice versa. Si nous admettons
que nous avons un avenir commun et conjoint, il ne faut pas s´y méprendre :
la liberté des congolais ne doit pas être faite à Bruxelles, mais bien à
Kinshasa par des élites pleinement conscientes de leurs obligations sociohistoriques
envers les leurs. Et il est de bonne objectivité humaine de critiquer ces élites
incapables et opportunistes qui géraient l´Afrique sans le moindre talent d´organisation
et de promotion, uniquement pour jouir de honneurs du pouvoir, ou pour se
mettre, avec les moyens financiers publics dont on abusait à loisir, à l´abri
de sa propre médiocrité. Nouvelle indépendance ? D´accord, mais pas de
retour à un colonialisme dépassé que quelques dictateurs ruineux et incapables
du pouvoir en Afrique préconisaient pour s´exercer sans talent aux détriments
des leurs. Au nom de la liberté, tout simplement ; et au nom d´un avenir
qui prenait aussi à cœur que les enfants africains cessent de souffrir et
jouissent eux aussi d´une liberté digne de ce nom. Et dans ce sens, une décolonisation permanente en Afrique est souhaitable; ce qui n´empêche pas, bien entendu, des rapports de respect mutuel avec tout le monde.
Musengeshi Katata
"Muntu wa
Bantu, Bantu wa Muntu"
Forum Réalisance